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La Bande Dessinée Hypermédiatique : dessiner les contours d'une pratique numérique de la bande dessinée. Margarita Molina Fernández - 2014

Informations

Support : Références scientifiques
Auteur(s) : Margarita Molina Fernández
Editeur : Ecole Européenne Supérieure de l'Image Université de Poitiers UFR Lettres et Langues Master 1 Texte-image : Bande Dessinée
Date : 2014
Langue : Langue


Description

Introduction
 
La bande dessinée dans l'univers numérique a dépassé les frontières de son format original. Bien-sûr, les BD sous forme de planche scannée sont encore populaires sur Internet. Toutefois, plusieurs bandes dessinées ont essayé de profiter des possibilités du numérique. Ainsi donc, dans une première réflexion esthétique entre 1996 et 2004 quelques auteurs comme Edouard Lussan1 et les frères Jouvray2 , venant du monde de l'animation, ont mélangé la bande dessinée avec l'animation et l'interactivité. Ils ont appelé généralement ces expérimentations « BD interactive ». Cependant, ce sont des projets ponctuels et ces auteurs ne poursuivent pas leurs efforts dans cette voie. L'expérimentation s'est arrêtée en 2009, quand Julien Baudry3 établit le début d'une deuxième révolution esthétique. D'un côté, l'idée que les formats de la bande dessinée papier ne s'adaptent pas à une lecture numérique est à la tête de la réinvention des interfaces de lecture. D'un autre côté, les expérimentateurs développent leurs inventions du point de vue théorique et pratique, comme Balak, qui en février 2009 théorise le « Turbomedia » au sein même d'un Turbomedia4 . Mais Balak n'est pas le seul à baptiser son invention. En 2008 le roman graphique Watchmen5 est adapté au numérique sous le nom Watchmen Motion Comic6 . Le nom Motion Comic sera utilisé à partir de ce moment par les studios et les éditeurs américains pour toutes les œuvres numériques similaires, celles qui mélangent au moins l'animation, le son et la bande dessinée. Nous avons observé une dernière étape qui est arrivée avec le développement des tablettes. En 2011 un « interactive graphic novel » (roman graphique interactif) sort comme application pour iPad : CIA : Operation Ajax7 . La production a duré 4 ans et le projet est exclusivement pensé pour être lu sur iPad. Par contre, l'application pour tablette de ComiXology permet de lire plusieurs œuvres. En plus, elle dispose d'un système de zoom dynamique, qui permet de naviguer dans la page agrandie pour visionner les détails du dessin et ne pas arrêter la lecture, et d'un système de lecture guidée, qui aide le lecteur à suivre le bon ordre de lecture dans une planche complexe. Mais les possibilités de ces dispositifs tactiles, les tablettes, sont encore plus vastes. C'est la raison pour laquelle nous ne traiterons pas des applications tactiles dans notre mémoire. Elles nécessitent une étude qui tienne compte de leur spécificité, c'est-à-dire, des différentes manipulations liées à leur lecture. Néanmoins, une autre application est sortie en 2012 pour iPad et iPhone, qui est aussi disponible pour lire sur ordinateur sur le site Web de Deviantart et dans le propre site de l'entreprise, Madefire. Ces œuvres, les « Motion Books », ont un système de lecture similaire aux précédents, et ils essayent de fondre une autre fois la bande dessinée, l'animation et le son, en ajoutant de nouvelles propositions interactives. Étant donné que les Motion Books ne changent pas leur forme ni leur lecture de l'écran de l'ordinateur à l'écran tactile de la tablette, nous allons les inclure dans notre corpus de travail. La découverte de ces Motion Books sur Deviantart a marqué le début d'une recherche personnelle, qui a eu comme résultat ce mémoire en lien avec les nouvelles manifestations de la bande dessinée numérique. Comme lectrice de bande dessinée et animatrice, ces œuvres représentent pour moi un nouveau champ d'étude et d'expérimentation. Cette bande dessinée expérimentale maintient encore son rapport avec la bande dessinée papier, dont elle conserve des codes formels, mais elle s'apparente aussi au film d'animation et au jeu video. En conséquence, quelques auteurs comme Thierry Groensteen et Elsa Caboche se demandent si ces œuvres relèvent vraiment de la bande dessinée. D'autres, comme Julien Baudry et Sébastien Naeco, basent leurs recherches sur l'histoire de la bande dessinée numérique et s'interrogent sur le possible aboutissement d'un standard. D'un autre côté, les auteurs se préoccupent d'expérimenter et de trouver des nouveaux modèles, en privilégiant les uns l'hybridation des médias et les autres les possibilités narratives ou n'importe quelle autre question, en dressant leurs propres idées et théories autour de leurs créations, en dessinant la frontière entre leurs œuvres et celles des autres auteurs. Néanmoins, personne ne semble s'intéresser ou trouver des ressemblances. Nous avons l'intuition que ces bandes dessinées ont des caractéristiques en commun, que des liens existent dans cette hétérogénéité d'oeuvres qui, pourtant, partent d'un même point : la bande dessinée. C'est pourquoi nous avons décidé de chercher ces liens et d'élucider si l'ensemble des oeuvres répondent à une même idée. Nous prétendons donc trouver une définition qui puisse englober ces nouvelles manifestations de la bande dessiné numérique, en essayant aussi de les classifier selon leurs caractéristiques propres. Nous considérons cela comme une bonne base pour nos futures recherches dans le domaine. Pour ce faire, nous allons voir ensuite comment les créateurs de certains types de bandes dessinées numériques expérimentales ont exposé individuellement la définition de leurs propres inventions, ainsi que leurs points de vue par rapport aux autres manifestations contemporaines. À partir de cela nous analyserons cinq exemples d'oeuvres produites de 2008 à cette année, chacune créée par un ou plusieurs artistes différents et provenant de la France, du Royaume-Uni et des États-Unis. Par conclure, nous offrirons une définition synthétique pour toutes les manifestations vues dans les différents parties, ainsi qu'une classification en accord avec les caractéristique formelles observées. Cependant, nous ne pouvons pas commencer sans un critère de base pour soutenir notre choix des œuvres, donc nous introduisons ensuite la terminologie que nous allons utiliser tout au long de notre discours, en développant les raisons de notre désignation.
 
 
Références (1) :
 
DJAOUTI, Damien, ÁLVAREZ, et al., « Morphologie des jeux vidéos » , actes du colloque "Hypertextes, Hypermédias (H2PTM 2007)", Hermès Science Publications, Lavoisier 978-2- 7462-1891-8, p. 277-287, octobre 2007.Disponible en ligne sur : http://archive.omnsh.org/spip.php?article135 


Mots-clés : Bandes-dessinées, Classification, Jeux vidéo